Il s’en passe décidément, à Roquebrune-sur-Argens! Notre belle commune varoise, abritée de son rocher au décor de western, était déjà la dernière à avoir enregistré le passage de Xavier Dupont de Ligonnès, l’un des hommes les plus recherchés depuis le massacre de sa famille.
Voilà que Joseph Macé-Scaron y plante la trame de son nouveau polar, « La Reine jaune », dont les assassinats atroces, sous couvert de canicule meurtrière, semblent s’inscrire dans l’histoire sanglante et mystérieuse des lieux. Une secte écologique radicale aux rites sanguinaires, l’empreinte des guerres de religion, un microbe dévastateur, un potentat local qui se nourrit de clientélisme…
Pas sûr que l’auteur soit embauché par l’office du tourisme! Mais n’allez pas croire qu’il éprouve de l’aversion pour la région. Le journaliste (« Le Figaro », « Marianne ») apprécie son climat et son mimosa. Mais aussi le mystère, où l’ont guidé ses pas…
« Ma belle-mère habite Roquebrune, et ça fait plusieurs années que j’y séjourne souvent. Mais ce n’est que récemment que j’ai découvert un ancien village Mérovingien, Sainte Candie, vestige abandonné dans ce rocher où la nature a repris ses droits. C’est surtout par cet élément-là que je voulais représenter Roquebrune. »
Fausses pistes et vrais cadavres…
Pour y accéder, un sentier escarpé, aléatoire… Mais dans son thriller, Joseph Macé-Scaron se complaît à multiplier les fausses pistes avant d’y arriver. À commencer par Dupont de Ligonnès.
« On ne peut pas en faire abstraction et, dans un polar, c’est forcément jubilatoire. À Roquebrune, les gens sont persuadés qu’il est toujours là, soit vivant, soit mort. J’ai pris le même chemin que lui en sortant de l’hôtel F1, qui conduit invariablement au rocher… »
Pour mener l’enquête, le capitaine Guillaume Lassire, gendarme musclé qui cède aux charmes vénéneux d’une comtesse, s’associe à l’experte chartiste Paule Nirsen, aussi jolie que futée. Entre manuscrit à décrypter, cadavres à repêcher et meurtriers masqués. Reflets de l’auteur, ces héros « deux en un »? (rires) « Ah ça, je ne sais pas. J’en avais assez de ces polars avec un flic massif et taciturne. C’était un pari pour moi de me mettre dans la peau d’une enquêtrice telle que Paule, mais mon éditrice a bien relu et validé. Et puis le gendarme, parce qu’ils n’ont pas toujours bonne presse, et c’est injuste. »
Action et érudition
Voilà pour le galon et l’érudition. L’action, elle, se confronte au souvenir des guerres de religions.
« Le comte de Carcès a jadis réuni les ultra-catholiques afin de pourchasser les protestants, et ce fut très violent et sanglant de chaque côté. Ce passé-là à Roquebrune, on ne peut pas l’enterrer, et faire comme s’il n’existait pas. »
Évocation rouge sang à l’encre noire, où le divin est assassin. Mais c’est pourtant dans un culte païen que réside la vraie menace. Via cette Reine jaune et ses sbires, dont la dévotion à la Terre en fait une secte particulièrement meurtrière. Allégorie d’une certaine idéologie? « Au nom de la Nature, et de la protection de la Terre, de ce culte à Gaïa, la secte occulte n’hésite pas à tuer. Quand j’ai écrit ‘‘La Reine jaune’’, je croyais forcer le trait, surtout sur la question du refus d’enfanter pour ne pas surpeupler, et j’ai finalement été rattrapé par la réalité! Mais c’était vraiment un régal d’écrire cette histoire. »
Au fil des pages, de quoi poursuivre cette Reine jaune à la couronne aux bois de cerf. Sans bien savoir si le lecteur sera chasseur, ou finira gibier…
> « La Reine Jaune » de Joseph Macé-Scaron. Éditions Les Presses de la cité (collection TerreSombres). 320 pages. 21 euros.
> L’auteur dédicace son ouvrage ce vendredi à partir de 11h sur la place Alfred-Perrin de Roquebrune-sur-Argens, et ce samedi de 10h à 12h à la librairie Charlemagne de Fréjus.
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